FORAGES

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On appelle forage l’ensemble des opérations permettant le creusement de trous généralement verticaux. L’utilisation principale des forages est la reconnaissance et l’exploitation des gisements de pétrole ou de gaz naturel. Les autres utilisations, qui sont nombreuses, comprennent notamment: les forages géologiques ou géophysiques pour la reconnaissance des gisements de minerais; les forages destinés à la recherche des nappes d’eau profondes, au drainage du gaz ou de l’eau dans les exploitations minières; les forages permettant l’injection de gaz dans des formations poreuses et perméables, pour réaliser des stockages souterrains, et ceux réalisés dans des dômes de sel, agrandis ensuite par injection d’eau douce et permettant le stockage de gaz liquéfiés comme le propane.

Dans le domaine du bâtiment et des travaux publics, les forages permettent l’injection de mortier de ciment en vue de la consolidation des piles, des appuis de ponts, des digues, etc., ainsi que la consolidation des massifs rocheux avant leur excavation, la reconnaissance du sous-sol par prélèvement d’échantillons (carottage) ce qui permet de déterminer les propriétés des différentes couches de terrain et donc le genre de fondations à adopter pour la construction des édifices. La technique du forage, quel que soit son objectif, utilise des moyens analogues à ceux des forages pétroliers.

Le forage pétrolier permet d’atteindre les roches poreuses et perméables du sous-sol, susceptibles de contenir des hydrocarbures liquides ou gazeux. Son implantation est décidée à la suite des études géologiques et géophysiques effectuées sur un bassin sédimentaire. Ces études permettent de se faire une idée de la constitution du sous-sol et des possibilités de gisements, mais elles ne peuvent déceler avec certitude la présence d’hydrocarbures. Seuls les forages pourront confirmer les hypothèses faites et mettre en évidence la nature des fluides contenus dans les roches.

La nature incertaine des fluides retenus dans le sous-sol et la complexité des dépôts sédimentaires sont la cause du nombre élevé de forages d’exploration négatifs (un sondage d’exploration productif pour douze négatifs) et de la part importante du coût des forages dans les frais de la recherche.

1. Architecture d’un sondage

Le profil d’un forage pétrolier dépend de sa profondeur (de quelques centaines à plus de neuf mille mètres) et de l’objectif visé. Il est défini dans le programme de forage et de tubage (fig. 1) du puits qui précise les caractéristiques des différentes phases de forage successives entre lesquelles le trou est «tubé», c’est-à-dire cuvelé par une colonne de tubes en acier. Dans la plupart des cas, les sondages pétroliers comportent deux ou trois phases de forage qui permettent de mettre en place:

– une colonne de surface destinée à retenir les terrains de surface peu consolidés; d’une longueur comprise entre 100 et 1 000 m, cette colonne sert en outre de support à la tête de puits;

– une colonne technique nécessaire en cas de présence de couches ou fluides susceptibles d’empêcher la poursuite du forage (par exemple des terrains éboulants, des zones contenant des fluides à forte pression);

– une colonne de production si le puits est «positif», qui permet d’isoler la zone pétrolifère et à l’intérieur de laquelle sera descendu un tube d’écoulement du pétrole (tubing ).

Ces diverses colonnes sont cimentées par un lait de ciment placé entre la paroi du trou et la colonne aussitôt après la descente de celle-ci.

Ces colonnes sont constituées de tubes en acier à haute résistance, de 9 à 12 m de long, terminés par des filetages spéciaux et réunis entre eux par des manchons. Leur épaisseur est de l’ordre du centimètre et leur diamètre peut varier de 1 000 à 114 mm.

Les longueurs et les diamètres des différentes phases de forage sont définis à partir des renseignements sur la nature des terrains et des fluides susceptibles d’être rencontrés au cours du forage, fournis par les géologues ou apportés par des sondages voisins.

À titre d’exemple, le programme de forage et de tubage d’un puits à 5 000 m, réalisé sur les gisements de la région de Pau, est donné à la figure 1. D’autre part, des forages à 2 600 m effectués dans le Sud-Ouest comporteront une colonne 9’’5/8 à 800 m, une colonne 7’’ à 2 200 m, une colonne perdue 4’’1/2 à 2 600 m. Ces sondages sont réalisés en 30 jours environ pour un prix global de 5 millions de francs. En 1990, dans la presqu’île de Kola, un forage commencé en 1970 a atteint 12 260 m. Ce puits est prévu pour atteindre 15 km, comme d’autres forages actuellement en cours depuis 1977, en Azerbaïdjan (forage de Saatley); depuis 1983, en Ukraine (forage de Krivoï-Rog); depuis 1988, dans l’Oural médian, en Russie (forage de Taguil), etc.

La connaissance de l’architecture du sondage permet de calculer et de prévoir le choix de l’appareil de forage, la durée des diverses opérations, les approvisionnements nécessaires, les consommations de produits et de matériel et finalement la durée totale et le prix de revient du sondage.

2. Procédés de forage

Lorsque le «colonel» Drake fora son premier puits en 1859, à 23 mètres de profondeur, près de Titusville en Pennsylvanie, il employa tout naturellement le système de forage par battage au câble qui utilise, pour attaquer le terrain, l’impact d’un lourd trépan suspendu au bout d’un câble qui lui transmet depuis la surface un mouvement alternatif créé par un balancier. Ce procédé a servi pendant la deuxième moitié du XIXe siècle à forer la quasi-totalité des puits de Pennsylvanie.

Forage rotary

Lorsque les prospecteurs s’attaquèrent à des terrains plus difficiles, ils durent s’y adapter en créant le procédé de forage rotary. Les premiers essais de cette technique semblent avoir été faits sur le champ de Corsicana (Texas); elle se développa rapidement à la suite de la découverte, en 1901, du champ de Spindletop près de Beaumont (Texas) où fut employé un appareil de forage rotary.

La méthode consiste à utiliser des trépans à molettes dentées ou des trépans diamantés, sur lesquels on appuie et que l’on fait tourner. L’action combinée du poids et de la rotation permet aux dents des trépans à molettes d’écailler la roche ou aux trépans diamantés de strier et de détruire celle-ci.

La rotation du trépan est obtenue en faisant tourner l’ensemble des tiges de forage (tubes d’acier de 9 m de long raccordés par des joints filetés) qui relient le trépan à la surface.

Il est possible de faire tourner l’ensemble des tiges et du trépan soit grâce à la tige supérieure de section carrée ou hexagonale qui s’engage dans un logement solidaire de la table de rotation, entraînée par un moteur, soit grâce à une tête d’injection motorisée.

On agit sur le trépan au moyen de 100 à 200 m de tubes très épais appelés «masses-tiges» exerçant une force de 100 à 300 daN par mètre, et placés au-dessus du trépan; ces masses-tiges ayant un diamètre voisin de celui du trépan tendent à maintenir la verticalité du trou.

Pour éliminer les débris de roches détachés du fond par le trépan, on emploie la technique de la circulation des fluides, inventée par M. Fauvelle en 1845. Elle consiste en l’injection d’une boue (mélange d’eau et d’argile) à l’intérieur des tiges de forage. Celle-ci, passant par les orifices du trépan, remonte dans l’espace annulaire compris entre le trou et les tiges de forage en entraînant les déblais jusqu’à la surface. Il suffit alors de faire passer la boue sur un tamis vibrant afin d’éliminer les déblais avant de la renvoyer dans le circuit. Une partie des déblais est conservée pour les géologues qui peuvent ainsi reconnaître la nature des terrains traversés.

Turboforage

Une variante du forage rotary consiste à assurer la rotation du trépan par une turbine de forage ou un moteur volumétrique placé au-dessus de celui-ci et mis en rotation par le fluide de forage. Dans ce cas, les tiges de forage ne tournent pas et la puissance est fournie directement au trépan.

Les turbines comportent de 100 à 250 étages, dont chacun est constitué d’un élément mobile et d’un ensemble fixe. Leur puissance est de l’ordre de 150 kW et elles fournissent des vitesses de rotation variant de 700 à 1 000 tours par minute, pour des chutes de pression de quelque 6 mégapascals (MPa).

3. Technologie des forages

Les trépans

Les trépans à molettes ou tricônes sont formés de trois molettes dentées ou équipées de bâtonnets en carbure de tungstène montées par l’intermédiaire de roulements sur les axes de trois bras réunis entre eux par soudure. Un filetage permet de visser l’outil aux masses-tiges.

Le passage de la boue s’effectue sur les côtés du trépan à travers des orifices calibrés de petit diamètre, qui permettent d’augmenter la vitesse du fluide de forage et de réaliser ainsi un nettoyage plus efficace du fond du trou. Le nombre et la longueur des dents ou la forme des bâtonnets de carbure de tungstène des molettes dépendent de la nature du terrain à forer (fig. 2).

Les paramètres de forage sont choisis suivant les terrains traversés; la vitesse de rotation est en général comprise entre 50 et 300 tours par minute et la force exercée sur le trépan est de l’ordre de 250 à 1 000 daN par centimètre de diamètre de trépan; par exemple un trépan pour terrains durs de 311 mm de diamètre pourra être utilisé à 100 tours par minute et 30 000 daN.

La vitesse d’avancement des trépans est fonction de la nature des terrains et varie de 1 à 2 m par heure dans les terrains durs à 30 m par heure et plus dans les terrains tendres. La durée de vie des tricônes à molettes dentées est de l’ordre de 40 heures; le travail du trépan a pour conséquences: une usure des dents qui peut aller jusqu’à disparition complète; une usure des roulements qui peut causer la perte d’une molette au fond du trou; une perte de diamètre dans les terrains abrasifs.

Pour améliorer la durée de vie des tricônes, les paliers des molettes sont lubrifiés et éventuellement lisses. Dans ce cas, la durée de vie de l’outil peut dépasser 150 heures.

Dans les terrains durs, on utilise souvent des trépans constitués de diamants industriels sertis dans une matrice très résistante (fig. 3). La grosseur, le nombre des diamants et la forme de l’outil dépendent des terrains à forer. La durée de vie et le métrage réalisés par ces trépans sont importants et peuvent atteindre 700 à 800 m forés en 100 heures. Leur prix, très élevé, est de l’ordre de 15 à 20 fois celui des tricônes.

Au lieu d’être sertis de diamants naturels, les trépans peuvent être équipés de pastilles sur lesquelles ont été déposés des diamants synthétiques. On réalise ainsi des outils de coupe qui permettent des vitesses d’avancement spectaculaires dans divers terrains. Ces trépans P.D.C. (polycristalline diamond compact ) concurrencent très sérieusement les outils diamantés.

La conduite du forage, c’est-à-dire le choix du trépan et des paramètres de forage, en particulier poids et vitesse de rotation, qui fourniront le prix de revient minimum du mètre foré, est une opération délicate. En effet, les roches rencontrées dans le sous-sol sont extrêmement hétérogènes, et les moyens qui permettent de connaître à l’avance les roches à forer limités; la mise au point d’appareils capables de mesurer les paramètres de fond et de les transmettre directement en surface permet de renseigner le foreur sur ce qui se passe au fond du trou; cela est maintenant possible grâce à l’informatique.

Le fluide de forage

En même temps qu’il remonte les déblais de forage, le fluide de forage a pour fonction de refroidir le tricône, de maintenir les parois du trou et de l’empêcher de s’ébouler grâce aux pressions hydrostatiques qu’il exerce latéralement, et, enfin, de retenir les fluides sous pression qui peuvent être contenus dans les roches, empêchant ainsi une éruption subite de gaz, de pétrole, ou même d’eau.

Le débit du fluide de forage doit empêcher les déblais de retomber au fond du trou; pour cela il faut que la vitesse de remontée de la boue dans l’espace annulaire soit de l’ordre de 25 à 50 m par minute, ce qui entraîne des débits d’environ 2 400 l par minute lorsqu’on fore en 311 mm et de 1 000 l par minute lorsqu’on fore en 216 mm.

La boue de forage est généralement constituée d’eau à laquelle sont ajoutés 5 à 10 p. 100 d’une argile spéciale (bentonite par exemple). Divers produits permettent d’ajuster ses caractéristiques aux valeurs désirées; ce sont par exemple des tanins ou des polyphosphates pour abaisser la viscosité, des amidons pour réduire le filtrat, c’est-à-dire la quantité d’eau pouvant filtrer à travers les parois du trou; de la barytine pour ajuster la masse volumique de la boue à une valeur telle que la pression hydrostatique au fond du trou au cours du forage reste supérieure à la pression des fluides contenus dans les roches.

La boue fait l’objet d’un contrôle constant et d’une préparation minutieuse suivant les terrains. Divers types de boue peuvent être utilisés pour forer des roches particulières, par exemple des boues saturées en sel pour forer du sel.

Lorsque les formations géologiques ne contiennent pas d’eau et sont bien consolidées, il est parfois possible de forer à l’air; dans ce cas, on utilise une batterie de compresseurs qui fournit environ 40 m3 d’air par minute sous une pression de 2 MPa.

Le volume de boue utilisé en permanence est de l’ordre de 150 à 200 m3. Cette boue est aussi un paramètre de forage, non seulement par sa densité, sa viscosité, son filtrat qui ont une influence sur la vitesse d’avancement, mais surtout par la puissance hydraulique qu’elle permet de fournir aux duses (orifice calibré monté sur l’orifice du trépan pour augmenter la vitesse de la boue dans l’attaque de certains terrains) des tricônes et qui participent ainsi au nettoyage du fond du trou.

Installation de forage

L’installation de forage est conçue pour permettre la manœuvre de la garniture de forage, pour le changement des trépans, la rotation de la garniture et l’injection du fluide de forage. La fonction levage est réalisée grâce à un ensemble d’éléments comprenant: une tour (derrick) ou un mât de forage de 45 m de haut destiné à permettre la manœuvre et le stockage vertical des tiges de forage, en général par tronçons de 3 éléments de 9 m; un treuil, comportant un tambour principal équipé d’un frein mécanique à bandes et d’un frein auxiliaire électromagnétique, relié à une boîte de vitesse à 2, 4 ou 6 rapports, permet la manœuvre de la garniture pesant environ 30 000 daN par 1 000 m à une vitesse moyenne de 1 000 m en une heure, grâce à un mouflage constitué par un câble de forage qui s’enroule sur le tambour du treuil, passe par un moufle fixe au sommet de la tour, et par un moufle mobile auquel est fixé un crochet de levage. Le câble s’arrête sur un point fixe au pied du derrick. La mesure de la tension du câble permet de connaître constamment le poids suspendu au crochet. La puissance motrice fournie à cet ensemble est obtenue par des moteurs Diesel ayant des puissances unitaires de l’ordre de 400 à 1 000 kW et réunis entre eux soit par une transmission mécanique, soit par un ensemble diesel-électrique. Des moteurs Diesel entraînent des génératrices à courant continu ou des alternateurs, et l’énergie électrique fournie est transmise par des câbles jusqu’aux moteurs électriques situés près du treuil.

La puissance nécessaire pour la manœuvre de la garniture varie avec la profondeur et passe de quelque 400 kW à 2 000 m à 1 550 kW à 6 000 m.

La fonction pompage est réalisée grâce à un ensemble d’éléments comprenant trois ou quatre bacs à boue, d’une capacité de 20 à 40 m3, deux ou trois pompes à pistons horizontaux à simple ou double effet; elles aspirent la boue des bacs et la refoulent à l’intérieur des tiges de forage par l’intermédiaire d’une conduite de refoulement, d’une colonne montante, d’un flexible d’injection et finalement d’une tête d’injection qui comporte une butée à rouleaux coniques et permet la rotation des tiges de forage, le reste demeurant fixe.

Ces pompes sont capables de fournir des débits de 1 000 à 3 000 l par minute à des pressions de 10 à 25 MPa. Leur puissance est de l’ordre de 500 à 1 200 kW et elles sont entraînées soit par les moteurs prévus pour le treuil soit par des moteurs indépendants. Sur les appareils lourds il y a en général deux pompes. La fabrication, l’entretien, le mixage de la boue sont réalisés par une pompe auxiliaire, à pistons ou centrifuge, qui permet également l’élimination des solides après passage au tamis vibrant, par envoi dans des hydrocyclones.

Autour des éléments principaux de l’appareil de forage se placent des installations diverses: groupe électrogène, réserve d’eau et de gas-oil, baraques, etc. (fig. 4).

L’ensemble d’un appareil de forage prévu pour forer à 4 500 m représente environ 1 000 tonnes de matériel, réparties en une cinquantaine d’éléments facilement manœuvrables pour permettre des déménagements rapides d’un puits à un autre à l’aide de camions à remorques. Quelquefois, dans les régions désertiques, l’ensemble de la machine peut être placé sur des chenilles et transporté d’un seul bloc sans démontage préalable.

Instrumentations

La réalisation d’un sondage pétrolier est parfois marquée d’incidents appelés instrumentations: bris de tricône, chute d’objets métalliques dans le trou, rupture des tiges de forage ou des filetages des masses-tiges, coincement des tiges de forage à la suite d’un éboulement, etc.

Il existe toute une gamme d’outils spéciaux et de techniques particulières pour «repêcher les poissons» restés dans le trou ou faire face aux différents incidents.

Citons par exemple, d’une part, l’overshot ou cloche de repêchage qui comporte des mâchoires permettant de repêcher des tiges ou des masses-tiges; d’autre part, le dévissage à l’explosif, qui permet de récupérer la partie libre d’une garniture coincée. Cette dernière technique consiste à faire descendre à l’intérieur des tiges un câble électrique au bout duquel se trouve un détonateur suivi d’un cordon de poudre; celle-ci étant placée au niveau du raccord que l’on désire dévisser, il suffit de mettre la garniture de forage en torsion à gauche pour que le dévissage ait lieu à l’endroit prévu lorsqu’on fait exploser la charge. La déflagration produit en effet une violente vibration transversale et longitudinale et, pendant un temps très court, le frottement des filets mâles et femelles se trouve diminué.

Lorsque l’instrumentation s’avère trop longue et trop onéreuse, il faut se résigner à boucher le trou avec du ciment et à reprendre le forage en déviation au-dessus du poisson.

Forages dirigés

Il n’est pas toujours possible d’implanter l’appareil de forage sur la verticale de l’objectif, en particulier lorsqu’un gisement se trouve sous un lac, un relief ardu, une mer. Parfois aussi des forages commencés verticalement doivent être déviés, l’objectif étant décalé (fig. 5). Dans tous ces cas, on a recours à la technique du forage dirigé.

De plus, pour développer un gisement à terre ou en mer, il est souvent plus économique de réaliser une grappe de puits déviés à partir d’un même emplacement, distants seulement de quelques mètres, plutôt que de faire plusieurs forages verticaux. Enfin, dans certains cas, la productivité des puits pourra être améliorée par des drains horizontaux. Ainsi, la plupart des forages de développement sont maintenant des forages dirigés qui, suivant le champ, peuvent aller jusqu’à l’horizontale.

Le profil d’un forage dirigé comporte trois phases: une partie verticale réalisée suivant les techniques de forage classiques; une partie courbe, au cours de laquelle la déviation est amorcée à l’aide d’outils déviateurs, puis augmentée aussi régulièrement que possible de 0,5 à 1 degré par 10 m en modifiant les paramètres de forage, jusqu’à une valeur comprise entre 25 et 40 degrés; une partie inclinée mais droite en direction de l’objectif, l’inclinaison étant maintenue constante par l’utilisation de stabilisateurs placés entre les masses-tiges.

L’outil déviateur le plus courant est le raccord coudé de 1 à 2 degrés placé au-dessus d’une turbine de forage ou d’un moteur volumétrique et qui oblige celle-ci à se décaler par rapport à la verticale.

Le contrôle de l’orientation du trou est réalisé à l’aide de capteurs, placés au-dessus du trépan, qui mesurent l’azimut et l’inclinaison du trou. Les mesures sont transmises en surface par l’intermédiaire de la boue de forage, par le biais de pulsations de pression. Ces outils permettent de connaître constamment l’inclinaison et l’azimut en cours de forage.

Le niveau actuel de la technique du forage dirigé permet d’atteindre, avec une précision de l’ordre de quelques mètres, un objectif situé à 4 000 m et décalé verticalement de plus de 1 000 m par rapport à l’emplacement.

Contrôle des éruptions

La pression hydrostatique exercée par le fluide de forage est parfois insuffisante pour maintenir sous pression les fluides contenus dans les roches perméables rencontrées. Un début d’éruption peut alors se manifester, tout d’abord par une augmentation du volume de fluide dans les bacs à boue, puis par une augmentation de la pression en tête de puits. Cet incident est normalement contrôlé au moyen d’obturateurs de sécurité placés en tête de puits. Ceux-ci sont des vannes spéciales qui permettent d’obturer l’espace annulaire en surface et, lorsque la masse volumique du fluide de forage est insuffisante, de remplacer celui-ci par un fluide plus lourd, en réalisant une circulation sous pression; l’excès de pression est absorbé par le passage du fluide dans des duses placées à la sortie du puits, sous les obturateurs. En général, le puits est équipé d’un jeu de deux ou trois obturateurs dont la fermeture est commandée hydrauliquement et qui peuvent supporter des pressions de 21, 35 ou 70 MPa.

Lorsque les obturateurs de sécurité sont défaillants, il peut y avoir une éruption libre accompagnée souvent d’une inflammation des hydrocarbures qui jaillissent du puits. La méthode généralement utilisée par les spécialistes («pompiers volants») pour vaincre l’éruption consiste à éliminer toute la ferraille calcinée aux abords du trou, à «souffler» la flamme à l’aide d’une charge d’explosif et à mettre en place sur ce qui reste de la tête de puits une vanne spéciale pour obturer définitivement celui-ci.

Ce sont des opérations difficiles et dangereuses et il est parfois préférable d’essayer d’atteindre la couche qui débite au moyen d’un forage dirigé.

Carottage, diagraphies, tests

L’objectif d’un forage pétrolier consiste en la recherche d’horizons productifs et il est indispensable d’obtenir le plus grand nombre de renseignements possible sur les formations traversées et les fluides qu’elles contiennent.

Les déblais remontés du fond du puits par le fluide de forage font l’objet d’examens systématiques qui permettent de définir leur nature et, le plus souvent, de les dater, grâce aux microfossiles qu’ils contiennent. Pour préciser ces renseignements, on procède quelquefois à un carottage mécanique qui consiste à forer les formations à l’aide d’une couronne diamantée surmontée d’un tube carottier destiné à recevoir la «carotte», cylindre de roche de 50 à 100 mm de diamètre et de 9 à 27 m de long. Les mesures des caractéristiques pétrophysiques des roches, en particulier de la perméabilité et de la porosité, sont effectuées sur ces carottes et servent ensuite à calculer les réserves du gisement, si l’on a constaté la présence d’hydrocarbures dans les roches.

La présence d’hydrocarbures ne se manifeste pas toujours de façon spectaculaire; aussi dispose-t-on de moyens (chromatographie notamment) capables de déceler, par exemple, dans les boues des traces de gaz provenant des roches qui ont été forées. Enfin, lorsque le sondage est terminé, la mesure des caractéristiques électriques, nucléaires, et soniques des roches traversées, qui dépendent de leur nature et des fluides qu’elles contiennent (eau douce, eau salée, hydrocarbures), permet de préciser les horizons susceptibles d’être productifs et de calculer certaines de leurs caractéristiques pétrophysiques.

4. Prix de revient des forages

Le travail sur une sonde est permanent; il est réalisé, sous la direction d’un chef de chantier, par équipes de cinq à six sondeurs se relayant toutes les huit ou douze heures.

La spécialisation du travail, la complexité des techniques et le prix élevé des divers matériels ont entraîné la création de sociétés de service spécialisées dans les différentes opérations qui se présentent au cours du forage. C’est ainsi qu’à côté de la société de forage qui réalise le sondage, il est fait appel à des sociétés de service pour le contrôle géologique de la sonde, pour le contrôle et l’entretien des boues de forage, pour la conduite des opérations d’instrumentation et de forage dirigé, pour les injections de ciment, etc.

La durée d’un sondage dépend naturellement de sa profondeur, de la nature des terrains rencontrés et des incidents de forage; par exemple, des sondages de développement à 2 500 m sur le gisement de Parentis sont terminés en 23 jours environ; par contre, dans la région de Pau il faut compter 150 jours pour atteindre la profondeur de 5 500 m.

Le coût des forages pétroliers représente encore une part importante de l’ensemble des investissements de la recherche pétrolière (environ 60 p. 100). Le prix des forages terrestres varie en 1993 d’environ 50 F par mètre (sondage peu profond) à 2 000 F par mètre (sondage supérieur à 4 500 m). Ce prix correspond aux frais de fonctionnement de l’appareil de forage (amortissement, main-d’œuvre, entretien), au prix des matières consommables (trépan, tubage, produits à boues) et des services fournis par les sociétés spécialisées.

Des efforts sont accomplis par les grandes sociétés pétrolières pour diminuer le prix de revient et moderniser la technique du forage.

5. Forages en mer

Les procédés de forage en mer diffèrent peu des techniques utilisées à terre, mais l’environnement marin exige un matériel spécialisé et entraîne des services particuliers.

Suivant la profondeur de la tranche d’eau et l’agitation de la mer, on utilise: des barges à fond plat coulées (marigots du Texas); des barges auto-élévatrices (tranche d’eau de 20 à 80 m) munies de piles qui peuvent prendre appui sur le fond de la mer et permettre de placer la plate-forme à une dizaine de mètres au-dessus des plus hautes vagues; des plates-formes fixes sur lesquelles est placé le treuil de forage; un ponton annexe, le tender, comportant tout l’équipement; des plates-formes fixes, sur lesquelles est placé tout l’équipement de forage et qui permettent de réaliser des grappes de 6 à 48 forages dirigés pour développer les gisements; des plates-formes semi-submersibles (tranche d’eau supérieure à 80 m) comportant d’énormes flotteurs leur permettant d’être relativement insensibles aux houles et aux vagues; des bateaux de forage, au-delà de 80 mètres.

Outre l’appareil de forage proprement dit, ces installations comportent divers services qui en font de véritables usines flottantes. On y trouve en particulier: un quartier d’habitation pour une cinquantaine de personnes; un héliport pour le transport du personnel; un ensemble diesel-électrique capable de fournir du courant continu pour l’appareil de forage et du courant alternatif pour les différents services (ballastage, treuil d’ancrage, treuil de manœuvre des piles, etc.); des grues pour le déchargement des bateaux de service et la manutention du matériel de forage; des petites unités spécialisées, pour les opérations de mesure dans le puits, pour les pompages particuliers et pour les opérations spéciales; un caisson de recompression pour les plongeurs.

Le forage en mer exige en outre une infrastructure importante comportant en particulier un service météorologique, un système de télécommunication et de repérage en mer, un bateau de surveillance, un bateau de relève, une base à terre. Tout cet ensemble entraîne des frais importants qui font que les forages en mer sont en général cinq à dix fois plus coûteux que les forages à terre.

Lorsque l’on fore à partir d’engins flottants, les opérations de forage en mer sont particulières car il faut munir la garniture de forage de coulisses qui permettent d’éliminer l’effet du pilonnement du navire ou de la plate-forme semi-submersible ou équiper l’appareil de forage d’un compensateur de pilonnement placé sur le moufle mobile ou le moufle fixe. D’autre part, l’ensemble des obturateurs de sécurité est placé au fond de l’eau, et leur mise en place et leur manœuvre doivent s’effectuer de la surface au moyen de commandes hydrauliques ou électriques. Il est parfois nécessaire de faire appel à des plongeurs, soit pour vérifier le bon fonctionnement des différents systèmes, soit pour aider à leur mise en place. L’ensemble des obturateurs est monté sur une rotule qui permet un certain débattement de l’engin de forage par rapport à la verticale.

Les bateaux de forage à positionnement dynamique permettent de forer dans des profondeurs d’eau importantes (plus de 1 800 m). Dans ce cas, l’engin de forage reste en place au-dessus du puits, grâce à un système d’hélices (4 à 8) commandées par un ordinateur, qui peuvent lutter contre l’action du courant, de la houle et du vent, et maintenir le bateau en place.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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